Créativité
de la Crise, Evelyne Grossman, Paradoxe Editions de Minuit
Deadline comme disent les
Anglo-Saxons, date butoir : au-delà de cette limite... vous êtes mort ou
quasiment. Grossman, Evelyne. La
Créativité de la Crise
Toute désorganisation accrue
porte effectivement en elle le risque de mort, mais aussi la chance d’une
nouvelle réorganisation, d’une création, d’un dépassement.
Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
Crise actuelle engendrée par
la perte de foi dans un progrès supposé apporter le bien-être à l’ensemble de
l’humanité conformément à l’idéal de la philosophie européenne des Lumières.
Nous avons longtemps cru, souligne-t-il, que la science, la technique,
l’économie pouvaient résoudre les grands problèmes du monde. Or, en dépit de
bénéfices indéniables, les prétendus « effets secondaires » sont en
fait cataclysmiques et les potentielles « victimes collatérales » se
comptent par millions.
Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
La ritournelle
déprimée : « c’était mieux avant ! » signe l’effondrement
de nos espoirs dans le futur. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise
Ma
blessure existait avant moi, je suis né pour l’incarner. Grossman, Evelyne. La Créativité de la Crise
« Ou bien la morale n’a
aucun sens, résume Deleuze, ou bien c’est cela qu’elle veut dire, elle n’a rien
d’autre à dire : ne pas être indigne de ce qui nous arrive. Au contraire,
saisir ce qui arrive comme injuste et non mérité (c’est toujours la faute de
quelqu’un), voilà ce qui rend nos plaies répugnantes, le ressentiment en
personne, le ressentiment contre l’événement. » Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
Celui qui
sodomise une femme ne s’unit qu’à lui-même. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise
Le désir fait écrire ;
la morale – fût-elle stoïcienne –, c’est moins sûr. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
Opposition que voyait aussi
saint Augustin entre une force créatrice, la Vie, et une force destructrice,
l’Envie. Grossman, Evelyne. La Créativité
de la crise
L’organisation sociale se
construit sur ce premier modèle biologique d’opposition. Or, en passant du
biologique au social, les paires d’opposés se hiérarchisent ; la
distinction entre féminin et masculin est universelle mais nulle part cette
opposition binaire n’est symétrique. Toute pensée de la différence s’insère
ainsi dans une classification où le pôle masculin est toujours et partout
valorisé, affecté d’un signe positif.Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise
« Pour se reproduire à
l’identique, l’homme est obligé de passer par un corps de femme. Il ne peut le
faire par lui-même. C’est cette incapacité qui assoit le destin de l’humanité
féminine. » On comprend alors selon l’anthropologue cette obsession
millénaire des hommes de s’approprier et de contrôler le pouvoir de fécondité,
ce pouvoir de création des femmes. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 46
Penser, pour lui, c’est
d’abord donner à la pensée un corps, l’incarner dans une forme, une écriture. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 47
À chaque fois ce qui rate
c’est l’incarnation de l’idée, et sa pensée se « décorporise », elle
ne parvient pas à prendre forme, elle avorte.
Grossman,
Evelyne. La Créativité de la p. 47
« ce que vous avez pris
pour mes œuvres n’était que les déchets de moi-même, ces raclures de l’âme que
l’homme normal n’accueille pas».Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 48
Barthes répondait :
« Parce que l’écriture décentre la parole, l’individu, la personne,
accomplit un travail dont l’origine est indiscernable. » Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 49
« Faites abstraction de
votre génie, de vos talents et de ceux de tous les autres. [...] Écrivez vite
sans sujet préconçu, assez vite pour ne pas retenir et ne pas être tenté de
vous relire. La première phrase viendra toute seule, tant il est vrai qu’à
chaque seconde il est une phrase étrangère à notre pensée consciente qui ne
demande qu’à s’extérioriser. [...] Continuez autant qu’il vous plaira.
Fiez-vous au caractère inépuisable du murmure3. » Grossman, Evelyne. La Créativité de la pp. 51-52
« Il va, porté par ces
images qui le ravissent, qui lui laissent à peine le temps de souffler sur le
feu de ses doigts4. » Grossman, Evelyne.
La Créativité de la crise p. 53
« le lieu vide où s’annonce
l’affirmation impersonnelle ».Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 54
« L’œuvre exige de
l’écrivain qu’il perde toute “nature”, tout caractère, et que cessant de se
rapporter aux autres et à lui-même par la décision qui le fait moi, il devienne
le lieu vide où s’annonce l’affirmation impersonnelle8. »Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 55.
Il faut persévérer dans l’étrange énergie du
désœuvrement « en supportant la détresse d’un échec irrémédiable »
jusqu’au flamboiement de la couleur, comme chez Van Gogh. Ou jusqu’à
l’éblouissement des images surréalistes, pourrait-on ajouter. Ce que les
surréalistes avaient donc découvert, c’était non pas la promesse d’une
créativité à portée de tous mais l’existence d’une force impersonnelle à
l’œuvre dans l’œuvre. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 56
Les surréalistes dévoilaient
une expérience tout autre, celle de « l’insécurité de
l’inaccessible9 ».Grossman, Evelyne.
La Créativité de la crise p. 56
Le fantasme procréateur a la
vie dure, permettant çà et là d’irrévérents jeux phoniques (ImmaCULée
CONception) moins blasphématoires que gaillardement sexuels. Grossman, Evelyne. La Créativité de la
crise p. 57
Dans ces livres majeurs
écrits à deux que sont L’Anti-Œdipe (Minuit, 1972) et Mille plateaux (Minuit,
1980), ils explorent ce qu’ils appellent des heccéités : des singularités
pré-individuelles, non personnelles.Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 63
Un individu acquiert un
véritable nom propre, à l’issue du plus sévère exercice de dépersonnalisation,
quand il s’ouvre aux multiplicités qui le traversent de part en part, aux
intensités qui le parcourent. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 65.
On se souvient de la charge
plaisamment ravageuse de Deleuze contre l’histoire de la philosophie, cette
« formidable école d’intimidation », fabriquant des spécialistes de
la pensée : « Elle a joué le rôle de répresseur : comment
voulez-vous penser sans avoir lu Platon, Descartes, Kant et Heidegger, et le
livre de tel ou tel sur eux ? [...] Une image de la pensée, nommée
philosophie, s’est constituée historiquement, qui empêche parfaitement les gens
de penser. Grossman, Evelyne. La
Créativité de la crise pp. 65-66
« Chacun est le
faussaire de l’autre, ce qui veut dire que chacun comprend à sa manière la
notion proposée par l’autre. Se forme une série réfléchie, à deux
termes. » Chacun comprend « à sa manière »Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 66
Le philosophe selon Deleuze est un déviant : il
vole des idées, emprunte sans prévenir, par-derrière, trahit. Ainsi se conçoit
l’histoire de la philosophie « comme une sorte d’enculage ou, ce qui
revient au même, d’immaculée conception [où l’on retrouve curieusement le
couple Breton-Éluard...]. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 67
Deleuze disait, de son
écriture avec Guattari, « on ne travaille pas ensemble, on travaille entre
les deux28 ». Grossman, Evelyne. La
Créativité de la crise p. 69
La « pensée du
dehors » est une « percée vers un langage d’où le sujet est
exclu ». Grossman, Evelyne. La
Créativité de la crise p. 70
L’auteur, répète-t-il, est
une position « transdiscursive » ; les grands auteurs (Marx,
Freud, dans son exemple) sont ceux « qui ont ouvert l’espace pour autre
chose qu’eux30 » Grossman, Evelyne.
La Créativité de la crise p. 71
« C’est cela qui me
paraît intéressant dans les vies, les trous qu’elles comportent, les lacunes,
parfois dramatiques, mais parfois même pas. Des catalepsies ou des espèces de
somnambulismes sur plusieurs années, la plupart des vies en comportent34. » Grossman, Evelyne. La Créativité de
la crise.p. 73
« Que vaudrait
l’acharnement du savoir s’il ne devait assurer que l’acquisition des
connaissances, et non pas, d’une certaine façon et autant que faire se peut,
l’égarement de celui qui connaît ? Il y a des moments dans la vie où la
question de savoir si on peut penser autrement qu’on ne pense et percevoir
autrement qu’on ne voit est indispensable pour continuer à regarder ou à
réfléchir. On me dira peut-être que ces jeux avec soi-même n’ont qu’à rester en
coulisses [...]. Grossman, Evelyne. La
Créativité de la crise p. 75
Foucault réaffirme
l’oscillation nécessaire entre vérité et mensonge. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 76
Ce fut un beau moment,
lorsque chacun pouvait parler à l’autre, anonyme, impersonnel, homme parmi les
hommes, accueilli sans autre justification que d’être un autre homme.Grossman, Evelyne. La Créativité de la
crise. p. 77
Le pur intervalle qui, de moi à cet autrui
qu’est un ami, mesure tout ce qu’il y a entre nous41. » Grossman, Evelyne. La Créativité de la
crise p. 79
L’Usage des plaisirs,
Foucault appelait non l’histoire de la philosophie mais « le corps vivant
de la philosophie ». Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise pp. 81-82
Le Baroque, rappelle-t-il,
est la sortie d’un long moment de crise où s’est produit l’écroulement du monde
de la raison classique. Celui-ci s’est effondré parce que, comme Descartes, il
a ignoré la courbure de la matière, ses ressorts de vitalité, son élasticité47.
Or, la caractéristique du Baroque, c’est précisément d’avoir conçu les
débordements d’espace et cette tendance qu’a la matière de se concilier avec le
fluide. Alors les corps deviennent flexibles et se plient dans des mises en
variation continue de la matière. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 82
Se « déprendre de
soi », comme le dit Foucault, requiert de cesser de se prendre pour un
sujet, doué d’une identité fixée, d’une intention d’œuvre arrêtée. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
(pp. 82-83
Parlant des fausses
revendications d’identité juive, Pierre Pachet me dit un jour
malicieusement : « Être juif, pour certains, c’est une histoire
infiniment désirable... » Dans ces jouissances bloquées sombrent parfois
les élans créateurs. Grossman, Evelyne.
La Créativité de la crise p. 84
Que faut-il entendre
finalement dans ce terme si érodé de « crise » ou plutôt comment en
réactiver l’écoute tant son pouvoir d’inquiétude semble émoussé, comme si la
crise, au vu de la liste sans fin ressassée des bouleversements annoncés, était
devenue notre horizon quotidien ? Mondiale, écologique, crise des repères,
de la famille, du politique, crise du sens... On n’en finit plus de réciter la
litanie de ses formes diverses. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 85
Devrait-on alors cultiver
l’insécurité ? Un tel mot d’ordre apparaîtrait évidemment choquant de nos
jours où le mot de « sécurité » est si constamment appelé en renfort
pour préserver notre repos quotidien, apaiser nos angoisses et nos peurs,
qu’elles soient individuelles ou collectives. Qui oserait faire l’éloge de
l’insécurité, fût-elle créatrice ? Grossman, Evelyne. La Créativité de la
crise p. 86
Ainsi, le
« Pèse-Nerfs » d’Artaud, le pli de Deleuze (ou Leibniz-Deleuze), le
« suspens » mallarméen, l’aphorisme nietzschéen... Pourquoi
« déséquilibre » ? Parce que, s’il est rompu, surgissent deux
risques : d’un côté celui de l’équilibre retrouvé, le retour à la normale
(voire à la normalité), à la vie ordinaire ; de l’autre, l’effondrement,
la chute, la folie. Grossman, Evelyne. La
Créativité de la crise p. 87
La crise est cette
séparation. Il le répète dans ses tout premiers textes : « Je peux
dire, moi, vraiment, que je ne suis pas au monde » ; ou encore :
« je m’assiste, j’assiste à Antonin Artaud ». Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise pp. 91-92
Que me veut-on à la fin et
quelle est ma place dans cette histoire ? Quel est ce Créateur impotent,
ce dramaturge incompétent qui a oublié d’écrire mon rôle ? Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 94
Brusquement, le réel se
détache et j’ai la sensation d’être séparé de moi et du monde, d’être
définitivement au spectacle. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 94
Qui parle ? Quelle est
cette voix en moi qui dit « je »,
Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise. p. 94
Qui parle quand je dis
« je » ? Qui est le sujet de la création ? Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 95
« Je m’assiste,
j’assiste à Samuel Beckett. » Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 95
On passe ainsi souvent sa
vie à attendre que quelque chose se passe, que quelqu’un entre en scène avant
de se rendre compte qu’il est trop tard, que rien ne s’est passé, que personne
n’est venu, que le spectacle est fini, que la vie est finie. Seule a duré,
indéfiniment étirée, l’attente. « [...] et où sont les autres spectateurs,
on n’avait pas remarqué, dans l’étau de l’attente, qu’on est seul à attendre,
c’est ça le spectacle, attendre seul, dans l’air inquiet, que ça commence,
[...] Grossman, Evelyne. La Créativité de
la crise pp. 95-96
D’où la plaisanterie
récurrente de Beckett : je suis né le jour de la mort du Sauveur, trop
tard pour le Salut ; il n’y a plus qu’à « se sauver tout seul »,
voire « se sauver » tout court, autrement dit, prendre la fuite. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 97
Avec Beckett, donc, la
source de l’écriture automatique, le dripping des mots qui tombent et
s’égouttent tout seuls, semble bien tarie.
Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 98
Pour Freud, on le sait, loin
d’être un raté seulement, le lapsus est une réussite de l’inconscient. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 99
Il faut en effet distinguer
deux choses : l’échec qui est un résultat et le ratage qui est un acte, un
processus mis à l’œuvre. L’échec répété est signe de névrose. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 100
Autrement dit, je vais
continuer à parler, à écrire... pour maintenir en vie cette création ratée,
cette dynamique (désespérée mais drôle) du ratage. Je vais continuer jusqu’à
l’épuisement mais l’épuisement est infini. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 101
« Tout ce qui était
directement vécu s’est éloigné dans une représentation14. » Ainsi, la
société marchande ne produit plus qu’un sujet-consommateur séparé de ses
véritables désirs. Grossman, Evelyne. La
Créativité de la crise p. 102
Le spectacle réunit le
séparé, mais il le réunit en tant que séparé15. » Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 103
Le sentiment humain s’est
ainsi chargé d’infiniment de douleur, d’arrogance, de dureté, d’aliénation, de
froideur par le fait que l’on croyait voir des contrastes où il n’y a que des
transitions21. » Grossman, Evelyne.
La Créativité de la crise p. 108
Zarathoustra en appelle à la
trahison, il n’en finit pas d’échouer et d’être la risée des hommes, il décline
et il tombe. L’opposé même de toute doctrine : éloge de la danse et de
l’insécurité. « Je vous le dis : il faut porter en soi un chaos, pour
pouvoir mettre au monde une étoile dansante23. » Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise pp. 109-110
Comment lutter contre la
bêtise ? Non pas en élaborant une critique solidement argumentée mais
plutôt en lui enlevant « sa bonne conscience », en sapant ses
fondements Grossman, Evelyne. La
Créativité de la cris . p. 111
La vérité n’est plus à
chercher mais à produire comme interprétation provisoire : conflit,
énigme, tension, instabilité – séparation sans synthèse comme chez
Héraclite24. Non plus la vérité solidifiée, sacralisée, doctrinale mais le
processus éphémère et sans cesse inachevé de création d’une interprétation.
Crise de la vérité, sans aucun doute.
Grossman, Evelyne. La Créativité de
la crise pp. 111-112
La question, entre
interrogation, exclamation et contradiction massive, reste en déséquilibre,
ouverte à toute interprétation. Vivre est indécidable. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 114
Inventer « une prosodie
neuve », une langue poétique instable qui ouvre dans les mots un
« centre de suspens vibratoire ». Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 114
Crépuscule des idoles,
§ 5 : « Je crains que nous ne puissions jamais nous débarrasser
de Dieu, parce que nous croyons encore à la grammaire28. » Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 115
Contamination réciproque de
Wille et Welle. « C’est ainsi que vivent les vagues, – c’est
ainsi que nous vivons, nous qui possédons la volonté ! Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise
p. 116
Les vagues (Welle) sont
comme moi, douées de vouloir et d’intentions, mais je suis une vague soumise au
mouvement du ressac. Grossman, Evelyne.
La Créativité de la crise p. 117
À la fin,
nous allons connaître le secret, le sens qu’avait tout cela. Et pourquoi pas le
sens de la vie, tant que vous y êtes ! Vous confondez le philosophe et le
prêtre ! Rien ne nous est donc donné à la fin : pas de solution à
l’énigme pour nous apaiser, aucune autre sinon celle dont nous pouvons être
l’acteur et le créateur. Grossman, Evelyne.
La Créativité de la crise p. 118
Poursuivez la quête,
continuez à rater le sens, ratez mieux, répète Beckett. Ceci n’est pas un
examen ; il n’y a ni gagnant ni perdant, ni Salut ni damnation. Et si l’on
tombe, c’est souvent drôle : enfin un événement ! On tombe comme
tombent les dés et les mots : le ratage est une expérimentation créatrice.
Grossman, Evelyne. La Créativité de la
crise pp. 118-119
La foi, dit Nietzsche nous
sert de soutien, de béquille. Or, on mesure le degré de faiblesse de quelqu’un
au nombre de principes « solides » dont il a besoin pour tenir
debout. Ce désir que nous avons d’un appui, « cet impétueux désir de
certitude », voilà ce qui conserve leur puissance aux religions, aux
métaphysiques, aux dictatures. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise (p. 119
Que faut-il imaginer au
contraire ? Une joie, une liberté du vouloir. Et voici la fin du
paragraphe : alors « l’esprit abandonnerait toute foi, tout désir de
certitude, exercé comme il l’est à se tenir sur les cordes légères de toutes
les possibilités, à danser même au bord de l’abîme ». Apprendre à danser,
toujours. Apprendre à traverser le déséquilibre.Grossman, Evelyne. La Créativité de la p. 120
Cultiver l’art de
l’interprétation comme puissance d’instabilité, d’invention, de créativité.
Éloge du déséquilibre créateur, refus des dogmes et croyances dictées.
Plaidoyer pour l’insécurité poétique et créative de ceux qui, comme dit
Deleuze, osent plonger dans le chaos. Grossman,
Evelyne. La Créativité de la crise p. 120
Louise Bourgeois :
« L’art est une garantie de santé. » Ajoutons : pour l’artiste
comme pour celui qui rejoue son œuvre avec lui. Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 121
Zarathoustra : il n’y a
pas de valeur en soi, toute valeur se crée, s’expérimente, dans l’équilibre
instable du désir et du rejet. « Évaluer, c’est créer : écoutez donc,
vous qui êtes créateurs ! C’est leur évaluation qui fait des trésors et
des joyaux de toutes choses évaluées34. » Grossman, Evelyne. La Créativité de la crise p. 124
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