mardi 26 février 2019

Ethique du Samourai Moderne, Patrice Franceschi

Ethique du Samourai Moderne, Patrice Franceschi

Petit manuel de combat  pour temps de désarroi



Pour le corps et le mental, la transmission de l’ensemble des arts martiaux traditionnels ; d’autre part, pour l’âme et l’esprit, un guide nouveau concernant la conduite

L’incessant et vertigineux progrès technologique masquait la stagnation du progrès humain, voire sa fin – et cette fin signifiait également la disparition d’une volonté, celle de vivre librement, c’est-à-dire d’agir et de penser par soi-même.

 « l’humanisme combattant ».

Par cette sorte de « savoir de la chair », il voulait rendre l’excellence accessible à chacun, sans présupposés culturels ou sociaux.

Préparez-vous à vivre dans un monde empli de prisons invisibles, un monde de fausses libertés, dénué de culture et de civilisation, un monde d’hommes à tête sans visage.

Du facile au difficile, la pente est montante. Du difficile au facile, la pente est descendante.

Soyez encore comme l’arbre : ses racines ancrées dans le passé lui fournissent sa substance de vie, son tronc se nourrit de cette substance pour affronter le présent, ses branches poussent vers le ciel pour dessiner l’avenir de leur choix.

Car vivre seulement dans le passé c’est mourir, seulement dans le présent c’est jouir de choses fugaces, seulement dans l’avenir c’est se perdre par avance.

Je suis simplement l’initiateur des choses à penser.

Si vous ne pouvez rien contre la mort, votre regard peut tout contre elle.

Soyez les maîtres de votre regard, samouraïs des temps à venir.

Pourquoi faire durer les naufrages ?

L’air du temps dédaigne la raison et révère l’insignifiance qui monte. Ne veut-on pas, pour notre plus grand bien, nous dispenser de tous les efforts – jusqu’à nous épargner le plus pénible d’entre eux : penser par nous-mêmes ?

Le bonheur véritable n’est rien d’autre que l’adéquation constante entre ce que l’on pense et ce que l’on fait.

Penser pour agir droitement » et « agir pour penser justement » – ainsi que l’exigent deux de nos préceptes.

« Fais quelque chose de ta vie » plutôt que : « Jouis des biens de ce monde. »

Ainsi, que craint l’homme ancien ? La mort. Que craint le samouraï moderne ? De mal employer le temps précédant sa mort.

« Homme insensé, n’as-tu pas vu que le bien c’est au moins ce qui te fait du bien et le mal ce qui te fait du mal ?

Qu’il est bon que votre corps soit le serviteur de votre esprit et que vous devez les faire cheminer ensemble comme un attelage parfait.

Ainsi, courage et volonté sont les deux chevaux d’un attelage mené par un cocher nommé raison. L’un des guides logés dans le corps de ce cocher s’appelle générosité.

À la plus grande des dignités – mais la plus dangereuse de toutes : devenir à vous-mêmes votre propre loi. Peu vous importeront alors les lois des pays où vous cheminerez. Seules compteront les lois de l’éthique du samouraï moderne.

Ainsi, ne craignez pas les épreuves. Souhaitez-les même avec impatience – s’il le faut, appelez-les de vos vœux. Car comment connaître votre valeur sans vous soumettre à ces tribunaux de la vérité ? C’est par elles que vous pourrez répondre à l’antique interrogation : « Connais-toi toi-même », c’est par elles que vous serez forgés – et non par le cours paisible qui affecte les vies sans buts. Souvenez-vous de ceci : la vraie valeur est avide de périls.

Quel que soit le métier dans lequel vous déciderez d’entrer, samouraïs du futur, il comportera deux routes entre lesquelles il vous faudra choisir : la route qui fait les carrières et la route qui fait les destins. Vous savez par avance ce que doit être votre choix – et rien ne doit vous en détourner. Souvenez-vous qu’à trop penser à son estomac on finit par imiter le bétail.

Effacer de votre dictionnaire ces mots de découragement et de renoncement. Cela fait, demandez-vous quel est votre adversaire principal, celui dont vous ne pourrez jamais effacer le nom : vous-même.

Vous serez à tout instant la somme de vos actes –

Par valeur universelle, nous autres samouraïs modernes entendons une valeur partagée par tous les hommes, en tout temps, en tout lieu, et dans toutes les sociétés. Trois de ces valeurs ont pour noms : générosité, courage, intégrité. Elles demandent des efforts pour exister en acte.

L’un de vos adversaires se nomme : aveuglement.

Mieux vaut risquer de se perdre qu’hésiter à agir. Vivez dangereusement.

Qu’est-ce que le progrès ? Toute nouveauté qui rend l’homme plus humain qu’il n’était. C’est une évidence au regard de notre éthique. Par conséquent, les choses nouvelles qui ne mènent pas à ce but doivent être appelées : « faux progrès ».

Pour lutter contre la vie aseptisée, il faut parler vrai. De manière générale, soyez poliment incorrects quand il faut être correct et polis incorrectement quand il faut être poli.

Si le pire nous arrive, nous pouvons toujours le surmonter par le mépris.

Et qu’est-ce que le vrai ? Ce que l’on ne peut plus dépasser.

Qu’est-ce que le respect ? Tout acte envers un homme – ou toute parole – qui lui donne le sentiment « d’être ce qu’il sent qu’il est ».

Qu’est-ce que le discernement ? La faculté de distinguer les biens et les maux, le juste et l’injuste, l’honnête et le malhonnête, l’utile et l’inutile, le grand et le petit.

Si tu reconnais que la tension des opposés peut être fructueuse, tu rendras fécondes toutes les contradictions qui sont en toi. »

Faites-en au contraire votre plus grande force – puisque vous demeurez propriétaires de votre vision du monde par la maîtrise de votre regard.

Aucune éthique ne subsiste sans une force pour la défendre.

Il arrive que ce soit en mourant que l’on se sauve.

Puisqu’un samouraï moderne agit toujours pour plaire à son âme.

Quand les circonstances et la nécessité l’exigent, il faut entrer dans la mêlée et préférer la mort à la servitude. »

Vous ne devez jamais accepter l’humiliation dans vos vies. Ni l’humiliation qu’on vous inflige, ni celle que vous pouvez infliger.

Lutter avant tout contre la contrefaçon qui hante le monde – l’autre nom du mensonge et de la tromperie.

Nous ne sommes pas simplement responsables de nos actes. Nous sommes responsables de tout ce qui se passe sous nos yeux.

Toujours ils vous convieront au grand banquet du divertissement et de sa société pour faire en sorte qu’à trop aimer le plaisir vous ne soyez plus capables de rien.

Être davantage victime que son voisin, telle est la grande compétition des temps modernes – amour dénaturé de la fierté.

Ne faites jamais vos choix en calculant les gains ou les pertes, vous n’iriez jamais très loin –

Décidez-vous toujours en fonction de ce en quoi vous avez foi – et quel que soit le prix, payez avec joie.

Car les hommes qui sont à plaindre sont ceux qui s’assoupissent dans le bonheur jusqu’à perdre leur fonction créatrice.

Voilà quelqu’un qui n’a besoin que de lui-même.

Ne plus avoir à penser par soi-même. C’est surtout cela que l’on pourrait appeler la fin du monde.

Il y a une colère qui naît à cause de notre sottise et une colère qui naît devant ce que nous devons refuser. Cette colère positive est l’origine profonde de nos révoltes et de nos décisions de combat.

« Avant nous, il était des choses qui étaient mieux et d’autres qui ne l’étaient pas. Après nous, il y aura des choses qui seront mieux et d’autres qui ne le seront pas. »

Qu’il est agréable de déplaire aux gens mauvais. N’est-ce pas la preuve que l’on se trouve sur la bonne voie ?

« S’ils tombent, ils combattent à genoux. »

Ne tenez jamais compte des jugements que l’on porte sur vous – ni ceux en bien, ni ceux en mal. C’est l’une des conditions de votre liberté.

Dans notre « monde mondialisé » où chacun juge chacun, seuls les vaniteux se réjouissent du bien que l’on pense d’eux, et seuls les incertains s’accablent du mal que l’on propage sur eux.

Que l’on vous juge autant au nombre de vos amis qu’à celui de vos ennemis.

Aussi longtemps que vous existerez, vous devrez vivre aux aguets

Ce qui doit être acquis est tout ce qui vient au secours de l’esprit pour le faire passer de l’obscurité à la lumière. Ce qui peut être délaissé est tout le reste – le superflu.

L’insécurité, la solitude, l’inconfort, vous garderont de toute dérive.

Ce qui nous arrive dans l’existence, le bon comme le mauvais, nous ne le devons qu’à nous-même.

« Qu’est-ce que la résignation, maître Isogushi ? » Je vous réponds : « Le fait de soupirer en haussant les épaules devant une chose négative au lieu de la refuser. »

Liberté et beauté ou – comme je l’ai déjà dit – vérité et silence, bruit et mensonge.

Concorde et discorde. Construction et destruction. Toute chose et son contraire.

Harmonie des contraires.

Il existe un remède à la brutalité de la loi des rapports de force. Pour les relations entre les hommes, ce remède s’appelle : amitié. Entre les États, il se nomme : réciprocité.

« Qu’est-ce exactement que la réciprocité, maître Isogushi ? » Je réponds : « L’acceptation par le fort d’un équilibre de puissance avec le faible.

Faire de chaque seconde une vie entière

Mémoires – ce lieu où nous déposons sans cesse notre identité

Que faut-il supprimer chez un homme pour espérer le voir devenir ce qu’il doit devenir ? La réponse tient dans la “liste de toutes les peurs” : La peur de mourir. La peur de vivre. La peur des autres. La peur de soi. La peur de l’avenir. La peur d’aimer.

La littérature comme arme de combat. Et la poésie comme cuirasse de vie.

Cette rhétorique du contre-progrès existe depuis l’origine des temps et ce sont toujours des hommes sans squelette qui l’utilisent et la maintiennent en vie

Conservez en votre être intime la certitude qu’exister, agir et penser sont aussi une seule et même chose et vous ne craindrez rien ni personne.

Ne jamais confondre Idéal et Idéologie. L’Idéal dit : il est dommage que les hommes ne puissent pas voler comme les oiseaux. Voyons voir comment les imiter. L’Idéologie dit : il est injuste que les hommes ne puissent pas voler comme les oiseaux. Voyons voir comment punir ces derniers et prendre leur place.

Ne craignez pas de penser à l’inverse du plus grand nombre, d’aller à contre-courant, de naviguer contre vents et marées – d’être seuls.


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