mardi 12 mars 2019

Post vérité et autres énigmes, Maurizio Ferraris, puf


Post vérité et autres énigmes, Maurizio Ferraris, puf


La science est la garantie d’une vérité qui rend libre (les Lumières) et elle est désintéressée, c’est-à-dire au-dessus des partis et privée d’intérêts pratiques (idéalisme).p. 9


Trump, en revanche, est l’expression d’une partie de sa nation, qu’il conçoit comme porteuse de vérité, une vérité qui n’a rien à voir avec l’objectivité mais qui concerne plutôt la solidarité d’un peuple contre les machinations d’une élite qui propage comme vérité, justice, savoir, les intérêts, les préjugés et les privilèges des « pouvoirs forts » (syntagme généralement invoqué par les présidents, les tsars et autres marginaux). p. 10


Faire attention à ce qu’on lit comme on fait attention à ce qu’on mange et à ce qu’on boit,



Ce n’est pas en exaltant le non-raisonnable, le faux et la volonté de puissance qu’on pourra améliorer la condition humaine.p. 13


Universités où l’on soutenait que la vérité n’est qu’une antique métaphore, que le médium compte plus que le message, et que, pour être vraiment démocratique, il faut tenir simultanément pour vraies la thèse selon laquelle les Amérindiens sont arrivés d’Asie à travers le détroit de Béring et la thèse selon laquelle les Amérindiens, comme le veulent leurs traditions, sont sortis des entrailles de la Terre.p 13-14


Pour diffuser n’importe quelle doctrine, il faut traditionnellement du prosélytisme. Des écoles coûteuses à monter, du personnel spécifique, des activités récréatives, des vêtements spéciaux, des distinctions hiérarchiques, des bureaux politiques, des structures de propagande et surtout beaucoup de répression. Depuis vingt ans et jusqu’à aujourd’hui, avec une efficacité et un pouvoir toujours croissants, tout cela est devenu inutile. Avec un téléphone mobile à la main, n’importe qui peut diffuser urbi et orbi ses opinions, un peu comme autrefois l’on affirmait ses goûts une télécommande à la main. Mais, là, le sentiment de toute-puissance est bien supérieur. p. 15


Les marchandises, sur lesquelles Marx avait construit son analyse sont désormais remplacées par des documents. p. 16.


Chacun porteur de ses propres convictions et avant tout de celle – fondamentale (et qui évacue la notion de « classe ») – selon laquelle « un égale un ».  p. 17


Pour les herméneuticiens, ce que nous savons, ou que nous croyons savoir, équivaut à ce qui est ; pour les philosophes analytiques, ce qui est équivaut à ce que nous savons. p. 18


Les « grands récits » qui justifiaient le savoir ont disparu, et le savoir est devenu une institution comme une autre. p. 21


La réalité n’existe pas, seul existe le langage dans lequel nous la décrivons. pp. 21-22


Les postmodernes subissaient la fascination du contraire, la puissance du faux. p. 22


Nietzsche : « Il n’y a pas de faits, il n’y a que des interprétations. » Phrase puissante et prometteuse parce qu’elle offrait en prime la plus belle des illusions : celle d’avoir toujours raison, dans n’importe quelle circonstance, et indépendamment de tout démenti de l’histoire ou de l’expérience. pp. 22-23


D’une part nous avons les héritiers de Nietzsche et de Heidegger – qu’on appelle habituellement « continentaux » mais qu’avec plus d’exactitude peut-être on pourrait justement définir comme « herméneutiques » – qui pensent que leur tâche philosophique consiste à critiquer passionnément (et parfois avec un acharnement qu’on réserve en général aux adversaires politiques) la Politique, le Capital, l’Inconscient, l’Aliénation, la Métaphysique. p. 23


Que pourrait être un monde ou simplement une démocratie où l’on accepterait la règle du « il n’y a pas de faits, il n’y a que des interprétations » ? p. 25


Les problèmes philosophiques viennent du monde, et non des séminaires et des articles publiés dans des revues. p. 27


La possibilité de faire en bonne conscience tout ce qu’on veut, en proclamant qu’on est un esprit libre parce que, au-delà du bien et du mal, il y a aussi un bénéfice secondaire à reproposer,  p. 29


Idée que la vérité est une notion inutile, potentiellement dangereuse et autoritaire, qui doit être remplacée par d’autres principes, jugés beaucoup plus tolérants : la démocratie, la solidarité, voire la charité.  p. 30


Les moteurs de la postvérité sont nombreux, même si sur tous domine la faiblesse humaine : l’esthétisation de la politique, sa popularisation (qui fait que la politique doit avoir à faire avec les masses, qu’il faut persuader et exalter), l’insatisfaction des intellectuels humanistes écartés par les scientifiques, la gêne causée par la massification de la classe cultivée apparue avec les temps nouveaux, la peur de l’appauvrissement et du déclassement et, inversement, une haine de classe qui se fait cri individuel.  pp. 33-34


Ce qui compte, c’est sentir, non savoir p. 36


Les masses s’impatientent et demandent quelque chose de plus solide : vous nous avez ôté Dieu et l’affouage, voulez-vous, s’il vous plaît, nous donner quelque chose en échange ? p. 36


Nous sommes habitués à considérer la modernité comme le triomphe incontesté de la démocratie et comme un dépassement du principe d’autorité, comme une émancipation dont, en définitive, la postvérité, comme égalisation et libéralisation des opinions, constituerait l’extrême manifestation.  p. 37


La vérité comme une institution politique qu’il faut lire en parallèle avec la théorisation du décisionnisme.p. 38


Telle est, à la fin, la grande alchimie du postmoderne : rendre fongibles à gauche des idées élaborées à droite, p. 38


Le mensonge transcendantal, c’est-à-dire la confusion entre l’ontologie, ce qui est, et l’épistémologie, ce que nous supposons ou croyons savoir ; le mensonge du pouvoir-savoir (voir dans le savoir une forme de volonté de puissance et rien de plus) ; et le mensonge de l’accepter-vérifier (penser que vouloir établir la vérité consiste en une pure acceptation de la réalité). p. 39


Tout s’équivaut, et dès lors s’ouvre un supermarché des croyances25. p. 42


L’ironisation, c’est-à-dire l’idée que prendre au sérieux les théories est l’indice d’une sorte de dogmatisme, et qu’il faut maintenir, vis-à-vis de ses propres affirmations, un détachement ironique, souvent manifesté graphiquement et gestuellement (en pliant deux fois l’index et le majeur des deux mains) par l’abus des guillemets. p. 43


Soutenir que les vieux dogmes doivent être archivés au nom de la tolérance a tout l’air d’être un grand dessein. p.43



Désublimation, c’est-à-dire l’idée que le désir constitue en tant que tel une sorte d’émancipation, puisque la raison et l’intellect sont des formes de domination, et que la libération doit être cherchée dans la direction des sentiments et du corps, p. 43


Désobjectivation, c’est-à-dire la thèse selon laquelle la solidarité amicale doit prévaloir sur une objectivité de toute façon illusoire .p. 44


Si l’on fait prévaloir la solidarité sur l’objectivité, on laisse la porte ouverte à une dérive incontrôlable (après tout, la mafia ou le népotisme sont des exemples insignes de prévalence de la solidarité sur l’objectivité). p. 45


Le « mensonge consensuel », qui oublie que l’on fait une moyenne entre les intérêts et non entre les vérités. p. 46


Prétendre séparer démocratie et vérité, justice sociale et observance des valeurs cognitives, n’est pas une bonne idée.  p. 46


Si toutefois les postmodernes pensaient que l’adieu à la vérité et à la réalité constituait une révolution qui allait libérer l’humanité, les postruistes ont préféré dire adieu en privé à la vérité, en se présentant en public comme les porteurs de vérités alternatives.  p. 47


De l’empereur, le pape a hérité le refus total du système démocratique. Pour lui ne se pose pas le problème essentiel des démocraties populistes et post-factuelles contemporaines, à savoir le fait que le suffrage universel a entraîné une course vers le bas dont triomphe le pire. p. 52


A qui juge que la postvérité est le prix à payer pour la liberté, on a envie de répondre le mot que Churchill eut à propos de Chamberlain en commentant les accords de Munich en 1938 : « Il pouvait choisir entre le déshonneur et la guerre. Il a choisi le déshonneur. Et il aura la guerre. » p. 53


Ne pas voir le nœud essentiel entre postvérité et médias, qui fait de la postvérité un phénomène radicalement nouveau par rapport aux mensonges classiques, qu’ils soient publics ou privés,  p. 54


Ne pas vouloir tirer les conséquences évidentes du fait que la facilité avec laquelle on fabrique du faux acquiert une puissance toujours plus grande dans la mesure où elle vient après une longue vague de discrédit idéologique du vrai, considéré comme source d’oppression et de dogmatisme, auquel il fallait opposer, au nom de l’épanouissement de l’humain, la force des narrations et des vérités alternatives, p. 54


Cacophonie de tweets et de posts où tout le monde élève la voix, faisant taire la conversation de l’humanité. p. 56


Le postruiste accorde peu d’importance au monde externe et beaucoup aux convictions privées. p. 57


 « La loi du cœur et le délire de la présomption », et qui aujourd’hui gazouille aussi bien du haut des palais que du fond des cabanes.p. 60


Devant son clavier, dans des conditions climatiques le plus souvent idéales, on peut fabriquer des conneries de façon régulière et prolixe – conneries qui peuvent parvenir jusqu’au bout du monde. p. 61


Les effets déstabilisateurs générés au Moyen Âge par le passage de la vérité comme fidélité personnelle et féodale à la vérité comme fait impersonnel garanti par des documents. p. 62



L’homme n’est pas un animal social, comme le prétend ingénument Aristote, mais un animal familier. Il aime les petits groupes et est en quête de confirmation et de protection. p. 66


Comme dans le messianisme, si la prophétie ne se réalise pas, c’est parce que nous avons été incapables d’y croire à fond, parce que nous n’avons pas assez lutté, parce que nous n’avons pas été suffisamment purs. Mais, guidée par des algorithmes qui créent des bulles de filtrage, l’attente d’une confirmation des croyances encore plus stupides et balourdes a devant elle des temps plus que bibliques. p. 68


L’ndignation est le meilleur substitut de l’action comme de la compréhension. p. 73


Ce sont nos besoins qui interprètent le monde : nos instincts, leur pour et leur contre. Chaque instinct est un certain besoin de domination, chacun possède sa perspective qu’il voudrait imposer comme norme à tous les autres instincts », Friedrich Nietzsche. p. 73


La postvérité selon l’Oxford Dictionary : « an adjective defined as relating to or denoting circumstances in which objective facts are less influential in shaping public opinion than appeals to emotion and person belief […] ; in 2016 post-truth has gone from being a peripheral term to being a mainstay in political commentary, now often being used by major publications without the need for clarification or definition in their headlines »… «Un adjectif défini comme se rapportant à ou dénotant des circonstances dans lesquelles des faits objectifs ont moins d'influence sur l'opinion publique que des appels à l'émotion et à la conviction personnelle […]; En 2016, la post-vérité est passée d'un terme périphérique à un pilier dans les commentaires politiques. Elle est souvent utilisée aujourd'hui par les grandes publications sans qu'il soit nécessaire de les clarifier ou de les définir.. »p. 73


La postvérité comme première manifestation de l’autonomie des êtres humains qui décident de penser par eux-mêmes. p.76


Charte des Nations unies : chacun doit pouvoir exprimer son opinion (évidemment, quand ce principe a été énoncé, personne ne pensait qu’il pouvait se réaliser, ce qui explique qu’on n’ait pas intégré la clause « pourvu que l’opinion soit raisonnable »).
p. 77


Un mode de production qui ne génère plus des produits manufacturés, mais (et cela advient déjà à l’ère des médias, où cependant règne le caractère éphémère du message : je reviendrai sur ce point) des objets sociaux ouvertement sociaux, les documents.p. 78


L production industrielle classique, qui devient un phénomène marginal.p. 78)


Parallèlement s’effacent les classes sociales correspondant au mode de production capitaliste. p. 79


La métamorphose du lien social, qui n’est plus assuré par des doctrines compactes et organisées (parti, église, école, syndicat, armée, usine), mais par un support « documental » monadique. p. 79


Chaque événement semble se répéter à proportion de ses occurrences documédiales. p. 85


La responsabilité se répartit et, de fait, s’annule, dans la mesure où elle ne concerne pas seulement l’auteur mais également celui qui relance le message et qui l’approuve par un like. Le web devient ainsi le règne du « on-dit », et la communauté de la communication, une communauté de désinformation. p. 86


Jünger :  la technique, comme une procession, porte sur le devant de la scène des choses très anciennes et, en particulier, la structure de la réalité sociale. p. 87


Au début il y a des institutions et des codes ; et nous, qui grandissons à l’intérieur, nous formons notre conscience et nos intentions, qui ne sont donc pas des phénomènes originaires, mais bien des effets dérivés. p. 88


Si l’humanité progresse, c’est de fait parce que sa nature est structurellement imparfaite et défaillante. p. 88


La réflexion technologique ne trouve donc pas son application privilégiée dans des machines simples, comme un levier ou (après tout) un ordinateur, mais consiste dans l’examen de ces technologies (avant-hier la manufacture, hier les médias, aujourd’hui la documédialité) qui structurent la réalité sociale, assurant le passage de la force (ce qui est, l’ontologie, les éléments bruts de la réalité sociale) à la forme (ce que nous savons, l’épistémologie, les structures manifestes du monde social). p. 88


L’esprit, la culture et les intentions précèdent la technologie, quand en réalité ils la suivent. p. 89


L’humain, loin d’avoir trouvé une prothèse dans la technique, est une prothèse de la technique. p. 90


Le web justement, qui a la caractéristique essentielle de garder la trace de toute interaction. p. 92


Sans documents, il est impossible de prouver la propriété d’une maison, et donc de la vendre ou de l’hypothéquer pour la transformer en capital. p. 97


Le travail nocturne et infantile sur le web est devenu une norme, et non une exception, et aucune mesure légale ou humanitaire ne cherche à y remédier. p. 101


Mutatis mutandis,  aujourd’hui on met à jour son statut et demain on répond à un email, le matin on voyage low cost et l’après-midi on rédige un essai critique, tandis que le soir on publie les photos du hamburger qu’on est en train de manger. pp. 103-104


La disparition de l’État (remplacé par les instances documédiales qui œuvre sur le web), à la disparition des classes, devenues méconnaissables (existe-t-il encore une bourgeoisie ? Un prolétariat ? Rien n’est moins sûr), à la réalisation de l’internationalisme sous la forme de la globalisation et de la dictature du prolétariat sous la forme du populisme. p. 106


Postuler une responsabilité kantienne a priori, un répondre de antécédent à l’expérience concrète du répondre à, c’est présupposer un membre fantôme appelé « intention », « compréhension », « volonté ». p. 110


La réalisation de l’essence de la vie humaine, qui trouve son existence, non dans la vie nue, mais dans ses suppléments, de la technique à la culture, et à la culture comme technique. p. 111


Quand on se plaint d’être « esclaves du téléphone portable », on croit énoncer un paradoxe emphatique, mais en réalité on dit une simple vérité, qui ne vaut pas seulement pour le portable mais pour n’importe quel objet technique. Si l’on veut déboucher une bouteille de vin, on est aussi esclave du tire-bouchon que de l’alcool. p. 115


« Moi, la vérité, je poste » : cette adaptation de la phrase de Lacan peut synthétiser l’état d’âme fondamental qui est à la base de la postvérité : énoncer une vérité ne signifie pas reconnaître un état de choses, mais affirmer sa propre identité.
p. 120


Les structures idéologiques modernes étaient le capital, la race, la foi, la patrie, le complot, etc. – c’est-à-dire des notions répandues dans des groupes vastes et cohérents. Les structures idéologiques postmodernes, qui se sont développées après la fin des grandes narrations, représentent une privatisation ou une tribalisation de la vérité.pp. 123-124


Millions de personnes convaincues d’avoir raison, non ensemble (comme le croyaient, en se trompant, les églises idéologiques du siècle passé), mais toutes seules ou mieux : avec pour seul répondant le web. p. 124


Auxx temps des idéologies, il y avait une seule vérité qui constituait un article de foi pour d’amples communautés. p. 124


À chaque étape, il y a une avancée dialectique, et non une régression. p. 125


« L’opinion publique » la nature humaine se manifeste comme porteuse de valeurs dans la quête de reconnaissance et dans l’auto-affirmation ; dans la révélation, nous avons la manifestation non idéalisée de la nature humaine. pp. 125-126


La postvérité nous libérera de la tyrannie des valeurs, dans la mesure où le pluralisme des vérités est considéré comme la prémisse obligée d’un polythéisme des valeurs, ce dont on pense qu’il est un bien en soi, à poursuivre et à corroborer.p. 133


Fait dépendre causalement l’ontologie de l’épistémologie (ce sont les interprétations qui causent les faits).p. 134


Je définis donc la vérité comme la rencontre entre ontologie et épistémologie opérée par la technologie.p. 139


La vérité est quelque chose qui se fait, c’est-à-dire qui dépend des propositions, p. 139


La « mésovérité ». Non parce qu’elle serait à mi-chemin entre les deux, mais parce qu’elle insiste sur le rôle de la médiatisation technique. Dans cette perspective, la vérité est le résultat technologique du rapport entre ontologie et épistémologie. Dans une boîte, il y a 22 haricots secs (ontologie) ; je les compte (technologie) ; j’énonce la phrase « dans cette boîte, il y a 22 haricots secs » (épistémologie). La phrase est vraie. p. 142


Schéma à trois points, où la réalité relève de l’ontologie, l’accès et l’interaction, de la technologie, et la vérité rentre dans la sphère de l’épistémologie.p. 144


« Exister, c’est résister » : il y a des objets du monde qui existent indépendamment de nos pensées et nous l’expérimentons justement quand elles résistent à nos pensées. p. 147


La vérité est absolue quant à l’ontologie, et relative quant à ses systèmes de mesure, parmi lesquels on comptera les mètres, les nombres, la logique et les schémas conceptuels. Toutes choses qui n’existent qu’en présence d’humains. p. 154

La quasi-totalité des notions qu’on croyait vraies, non pas il y a cent ans, mais – disons – il y a dix mille ans, pour ce qui nous importe, ont changé, et cela est si vrai que Ramsès II n’a jamais soupçonné qu’il était mort de tuberculose. p. 155


La blancheur de la neige est un fait perceptif, valide pour les humains mais pas pour les chauves-souris. p. 155


Il semble difficile d’avoir des rapports avec des parties de monde dont nous n’avons pas les concepts. p. 156


L’aspect intéressant de la technologie est justement d’être un médium, un intermédiaire, qui d’une part permet le contact et l’action dans la sphère ontologique, et d’autre part permet que, dans certains cas, la compétence puisse se transformer aussi en compréhension, en accédant à la dimension épistémologique. La technologie fournit ainsi, non des schémas conceptuels, mais des schémas interprétatifs.pp. 156-157


Force est de reconnaître que ce n’est pas la contemplation mais la construction d’appareils techniques suppléant à notre faiblesse constitutive qui est le premier pas de l’hominisation24. p. 158


Les problèmes qui restaient pendants et non résolus dans le schéma binaire ontologie/épistémologie trouvent une composition, intuitivement satisfaisante, dans le schéma ternaire ontologie/technologie/épistémologie. p. 159


Personne ne peut prévoir depuis l’origine les usages possibles du levier ou de la roue. p. 160


Connaître sur le bout des doigts les principes qui guident nos actes ne nous rend pas nécessairement efficients.p. 161


On fait d’abord interagir un système de signes pour des raisons pratiques ou rituelles, pour compter ou pour vaticiner. Avec le temps, cependant, les signes s’émancipent, gagnent en sophistication, et les actions (les opérations) qu’on peut réaliser avec ces signes gagnent aussi et surtout en sophistication. À la fin, la sphère de la mathématique émerge comme une collection de théorèmes et d’opérations vraies. C’est ainsi que, parmi les différents produits de la technologie, le plus important, même s’il est sous-estimé, est la vérité.  p. 162


William James : « Vraies sont les idées que nous pouvons assimiler, valider, corroborer et vérifier. Les idées qu’on ne peut soumettre à tout cela sont fausses36 ». p. 164


Augustin, lequel a dit qu’il ne faut pas chercher dehors mais que la vérité habite à l’intérieur de nous, qui nous montre comment une vérité ne peut exister sans une manifestation, une expression, une déclaration ou une confession. Ainsi la vérité n’est-elle pas quelque chose de tacite et d’inexprimé : elle n’existe que dans le moment où elle devient publique. p. 168


L’union entre la force constructive des documents en tant que fondements de la réalité sociale et la force déconstructive du web, qui les multiplie, les fragmente, les transforme, en provoquant une atomisation du tissu social. pp. 169-170


La vérité comme une relation à trois termes, entre ontologie, épistémologie et technologie. p. 170


parrhésía (dire la vérité au prix de sa vie), p. 172




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